La préservation de la personne physique contre l'altération de sa compréhension du sens et de la portée de l’engagement de caution envers un créancier professionnel est l'objectif substantiel des formules consacrées par les articles L331-1 et L331-2 du Code de la Consommation. C'est ce que nous révèle enfin la jurisprudence de la Cour de cassation après un long périple jurisprudentiel.
L’article L331-1 (ancien L341-2) du Code de la consommation pose une exigence ad validitatem (Cass. 1ère civ. En date du 25 juin 2009, pourvoi n°07-21.506 ; article L343-1 du Code de la Consommation : « Les formalités définies à l'article L. 331-1 sont prévues à peine de nullité. ») de l’apposition d’une mention manuscrite au sein du cautionnement simple formé par acte sous seing privé entre une personne physique qui se porte caution envers un créancier professionnel. Il en est de même pour le cautionnement solidaire (articles L331-2 [ancien L341-2] et L343-2 du Code de la consommation).
Dans le cadre de la mise en œuvre des exigences prescrites par les articles précités, il y a eu un long, et quelque peu tortueux, glissement jurisprudentiel quant au niveau de sévérité appliqué à la vérification de l’exact conformité de la mention manuscrite inscrite par la caution (simple ou solidaire) et celles imposées par la loi (c’est-à-dire :«En me portant caution de X...................., dans la limite de la somme de.................... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de...................., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X.................... n'y satisfait pas lui-même.» ; mais également : «En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X.»). Notamment, par une décision en date du 16 mai 2012, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation (pourvoi n°11-17.411) annulait le cautionnement dans lequel la mention manuscrite par la caution, personne physique, ne reprenait qu’approximativement la formule consacrée par l’article L331-1 du Code de la consommation. Alors que dans cette espèce, il n’était pas discuté le fait que la caution avait, par l’intermédiaire de la mention qu’elle avait manuscrite, une parfaite connaissance de l'étendue et de la durée de son engagement. En effet, la mention rédigée par la main de la caution avait la teneur suivante : « En me portant caution de Z… dans la limite des intérêts de retard et pour la durée de 108 mois et pour la somme de 74 400 € soixante-quatorze mille quatre cents euros. Couvrant le paiement Je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens. Si Z… n'y satisfait pas lui-même. En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2021 (nouv. Art. 2298, depuis ordonnance n°2006-346) du code civil et en m'obligeant solidairement avec Z…. Je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement ». Il est manifeste que la mention manuscrite par la caution, en tout cas au niveau de la reproduction de la formule de l’article L331-1 du code, n’était pas strictement identique ; de nombreuses libertés avaient été prises quant à l’agencement de certains termes, mais l’idée générale s’y retrouvait tout de même. En outre, des éléments avaient été ajoutés notamment afin de stipuler le caractère solidaire du cautionnement et de mettre en relief le niveau de gravité qu’implique la solidarité, c’est-à-dire la disparition du bénéfice de division et de discussion (art. L331-2 du Code de la consommation). Dès lors, bien que la mention inscrite par la caution ne fût pas un recopiage basique des formules consacrées, elle permettait de traduire l’ampleur de la gravité de la garantie souscrite en cristallisant la spécificité du cautionnement consenti par la personne physique au profit du créancier professionnel. Ainsi, plus qu’une transgression de la formule consacrée, l’adaptation qui en avait été faite constituait un enrichissement qui semblait être en cohérence avec la volonté du législateur de protéger la personne physique en lui imposant d’écrite de sa main une formule ayant pour finalité de la conscientiser. Un tel mixage par juxtaposition des deux formules, mais par un point-virgule, avaient été validée par la chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 5 avril 2011 (pourvoi n° 10-16.426 : « Attendu que pour déclarer nuls les actes de cautionnements souscrits par les consorts X..., l'arrêt constate qu'ils portent tous une mention manuscrite unique établie selon le modèle, suivie d'une signature, et retient que le fait de joindre les deux mentions manuscrites prévues par la loi aboutit à une phrase et qu'une telle juxtaposition des mentions prescrites par la loi, qui doivent être apposées successivement par la caution et non pas mélangées en une phrase incertaine lui rendant plus difficile de mesurer la portée de chacun de ses deux engagements, n'est pas conforme aux prescriptions d'ordre public des articles susvisés ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'apposition d'une virgule entre la formule caractérisant l'engagement de caution et celle relative à la solidarité n'affecte pas la portée des mentions manuscrites conformes aux dispositions légales, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; »). Le but des formules consacrées étant incontestablement de matérialiser la parfaite information dont avait pu bénéficier la caution quant à la nature et la portée de la garantie souscrite au profit d’un créancier professionnel (Cass. Com. 5 février 2013, pourvoi n° 12-11.720 : « Mais attendu que la violation du formalisme des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, qui a pour finalité la protection des intérêts de la caution, est sanctionnée par une nullité relative, à laquelle elle peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, en connaissance du vice l'affectant ; qu'ayant constaté que l'engagement litigieux ne comportait pas les mentions légales prescrites, l'arrêt retient que la caution, après avoir souscrit un prêt à cette fin, a réglé les sommes dues, sans mise en demeure préalable et en dépit des conseils contraires de son avocat et de son comptable et, qu'ainsi conseillée, elle a agi en toute connaissance de cause ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire que la caution avait entendu réparer le vice affectant son engagement , de sorte que cette confirmation au sens de l'article 1338 du code civil, l'empêchait d'en invoquer la nullité ; que le moyen n'est pas fondé ;»). La mention manuscrite qui avait été créée était le fruit d’une fusion-adjonction entre les exigences de l’article L331-1 (ancien art. L341-2) et celles de l’article L331-2 (ancien art. L341-3) du Code de la consommation. Malheureusement, à l’époque, dans l’espèce traitée notamment par la 1ère chambre civile Cour de cassation (1ère civ. 16 mai 2012, pourvoi n°11-17.411). Elle appréhendait l’exigence de la mention manuscrite davantage comme un impératif ad validitatem protecteur de la stricte similitude des formules et non de l’efficacité du contenu de ces dernières qui s’intéresse à la vérification que celui qui se porte caution à bien conscience de ce que cela implique (Cass. Com. 5 février 2013 [pourvoi n° 12-11.720] ; mais également Cass. 1ère civ. 16 octobre 2013 [pourvoi n° 12-17858] : «Attendu que M. X... reproche à l'arrêt de dire que si la banque ne peut se prévaloir du caractère solidaire des cautionnements souscrits en raison de l'irrégularité affectant la mention manuscrite relative à la solidarité, ceux-ci demeurent toutefois valables comme cautionnements simples, alors, selon le moyen, que l'inobservation de la mention manuscrite relative à la solidarité est sanctionnée par la nullité du cautionnement, conformément aux dispositions de l'article L. 341-3 du code de la consommation dont la cour d'appel a ainsi violé les termes ; Mais attendu qu'après avoir constaté que l'engagement de caution avait été souscrit dans le respect des dispositions de l'article L. 341-2 du code de la consommation, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que la sanction de l'inobservation de la mention manuscrite imposée par l'article L. 341-3 du même code ne pouvait conduire qu'à l'impossibilité pour la banque de se prévaloir de la solidarité, l'engagement souscrit par M. X... demeurant valable en tant que cautionnement simple ;»). En effet, sauf à faire la démonstration de l’existence d’une erreur matérielle, généralement, la Cour de cassation annulait la garantie dès lors que la formule manuscrite n’était pas strictement et exactement identique à celle consacrée (Cass. Com. 5 avril 2011, pourvoi n°09-14.358 : « Mais attendu que la nullité d'un engagement de caution souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel est encourue du seul fait que la mention manuscrite portée sur l'engagement de caution n'est pas identique aux mentions prescrites par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, à l'exception de l'hypothèse dans laquelle ce défaut d'identité résulterait d'erreur matérielle. »). Le défaut d’identité entre les formules consacrées par la loi (articles L331-1 [Caution simple] et L331-2 [caution solidaire] du Code de la consommation) n’entraine donc pas nécessairement l’annulation du cautionnement consenti par une personne physique au profit d’un créancier professionnel. L’erreur dite « matérielle » sauve l’opération de garantie. Par conséquent, il est nécessaire de cerner le contenu de cette notion « d’erreur matérielle » ; se poser la question de savoir ce qu’est exactement une erreur qui ne serait que matérielle et qui sauverait le cautionnement de la nullité ?
Indiscutablement, s’agissant d’une erreur, il faut admettre qu’il est donc identifié un événement qui est caractérisé par son inexactitude par rapport à une référence posée comme exacte, en l’occurrence les formules consacrées. A priori, elle ne relève pas d’un acte intentionnel ; sa cause est de l’ordre de l’inconscient, de la maladresse ou de la négligence. A fortiori, une erreur intentionnelle n’en est pas une. A minima, une telle « erreur » tient davantage du dol. Par conséquent, l’erreur matérielle doit nécessairement être non intentionnelle et portée sur le véhicule (la forme en quelque sorte) du message et non sur sa substance, c’est ce qu’implique l’adjectif « matérielle ». Ce terme renvoie à au moins deux types de dichotomies que l’on considère comme synonyme : matérielle/intellectuelle et instrumentum/negotium. Dès lors, il est possible de dire qu’une erreur matérielle consiste en l’inexactitude qui affecte, par inadvertance, un écrit sans altérer sa signification (Cass. 1ère civ. 11 septembre 2013 ; pourvoi n° 12-19.094). L’erreur peut notamment se matérialiser par l’omission ou une substitution (Cass. 1ère civ. 11 septembre 2013 ; pourvoi n° 12-19.094 : « Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient, d'une part, que dans l'acte de cautionnement du 1er août 2006, le texte reproduisant la formule prévue à l'article L. 341-2 est séparé de celui reproduisant la formule prévue à l'article L. 341-3 par une virgule et non par un point, en sorte que le premier mot de l'expression « en renonçant au bénéfice de discussion » commence par une minuscule et non par une majuscule ainsi qu'il est expressément mentionné à l'article L. 341-3, d'autre part, que dans l'acte de cautionnement du 24 avril 2008, les formules des articles L. 341-2 et suivant ne sont séparées par aucun signe de ponctuation et qu'une telle anomalie ne saurait être tenue pour une erreur purement matérielle puisque le texte unique ainsi composé au mépris des dispositions précitées est incompréhensible et de nature à vicier le consentement de la caution ; Qu'en statuant ainsi, alors que ni l'omission d'un point ni la substitution d'une virgule à un point entre la formule caractérisant l'engagement de caution et celle relative à la solidarité, ni l'apposition d'une minuscule au lieu d'une majuscule au début de la seconde de ces formules, n'affectent la portée des mentions manuscrites conformes pour le surplus aux dispositions légales, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; »). Lorsque l’écrit manuscrit par la caution n’est manifestement pas identique aux formules consacrées notamment du fait d’omissions de ponctuations ou de substitutions de minuscules par des majuscules ; il ne met plus nécessairement en péril le negotium. Il est ainsi pris une autre posture (Cass. 1ère civ. 16 mai 2012 [pourvoi n°11-17.411] ; Cass. Com. 5 avril 2011 [pourvoi n°09-14.358]) que celle qui permettait à la caution, qui par maladresse ou par filouterie recopiait plus ou moins fidèlement les formules consacrées, de se libérer de son engagement vis-à-vis du créancier sans que soit analysée la question de savoir si cette dernière avait, malgré ses errements de plume (intentionnel ou non), tout de même saisie la portée et le sens de l’engagement de cautionnement.
Une telle sévérité affectait la fiabilité des cautionnements formés par acte sous seing privé entre une personne physique et un créancier professionnel. Elle permettait à la caution d'échapper à son engagement, du fait de ses propres errements dans le copiage de la formule consacrée et faisait peser, à juste titre d’ailleurs, sur le créancier une obligation d’information de résultat devant se matérialiser par la vérification de la stricte exactitude de la mention manuscrite par la caution. En effet, cette jurisprudence dénaturait le but visé par l’article L331-1 du Code de la consommation, mais également celui visé par l’article L331-2 du même Code. La position de sévérité quant à la stricte identité occultait le fait que le contenu des formules consacrées vise à mettre en relief le fait que celui qui souscrit à l’engagement de caution ait pris conscience de la gravité d’une telle opération (Cass. 1ère civ. 27 novembre 2013 ; pourvoi n° 12-21.393 : « Attendu que pour prononcer la nullité du cautionnement et ainsi débouter la banque de sa demande, l'arrêt retient que la mention manuscrite rédigée par Mme X... n'est pas conforme à celle prévue aux articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, en ce que l'ajout des adjectifs « personnelle et solidaire » est de nature à altérer la portée de l'engagement résultant du premier de ces textes, tandis que l'erreur de référence textuelle relevée dans la mention manuscrite du second d'entre eux a privé Mme X... de la possibilité de s'informer sur la portée de l'engagement solidaire comprenant la renonciation au bénéfice de discussion ; Qu'en statuant ainsi, alors que ni l'évocation du caractère « personnel et solidaire » du cautionnement dans la formule caractérisant l'engagement de caution, ni la substitution du numéro « 2021 » au numéro « 2298 » dans celle relative à la solidarité, n'affectent la portée des mentions manuscrites, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; »). Il est indiscutable que les formules consacrées visent à matérialiser l’existence d’une adhésion réelle, sérieuse et pleinement consciente. Cet objectif est renforcé par l’exigence que la mention soit manuscrite et non simplement dactylographier puis soumise à la signature de la caution. Autrement-dit, il s’agit de figer par la mention manuscrite le fait que la caution personne physique ait consenti, en toute connaissance de cause (Cass. Com. 5 février 2013, pourvoi n° 12-11.720 [citée précédemment]), à l’opération sans être victime d’une erreur quant à la substance de l’engagement. C’est cette perception du contenu des articles L331-1 et L331-2 du Code précité qui entraine un changement de braquet de la jurisprudence. En effet, la Cour de cassation, notamment par une décision en date du 22 janvier 2014 (pourvoi n°12-29.177 : « Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer diverses sommes à la banque, alors, selon le moyen, que la nullité d'un engagement de caution souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel est encourue du seul fait que la mention manuscrite portée sur l'engagement de caution n'est pas identique aux mentions prescrites par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation ; qu'en estimant l'engagement de caution de M. X... valable, tout en relevant que la mention manuscrite de l'acte de caution n'était pas identique aux prescriptions des articles susvisés, la cour d'appel a violé les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation ; Mais attendu qu'après avoir constaté que la mention manuscrite portée sur l'acte litigieux était ainsi rédigée : « je soussigné X... Saïd déclare accepter de me porter caution de Alris Interactive dans la limite de la somme de 120 000 (cent vingt mille euros) couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard, et pour la durée de 51 mois. Je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si Alris Interactive n'y satisfait pas lui-même. En renonçant au bénéfice de discussion défini par l'article 2021 du code civil et en m'obligeant solidairement avec Alris Interactive, je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement Alris Interactive », c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que si cette mention n'était pas identique aux prescriptions légales dans la mesure où M. X... avai déclaré accepter de se porter caution au lieu de reproduire la formule « en me portant caution » prévue par l'article L. 341-2 du code de la consommation, avait mis un point à la place d'une virgule après l'indication de la durée de son engagement et avait fait référence à l'ancien article 2021 du code civil, alors que cet article était devenu l'article 2298 à l'issue de la loi du 23 mars 2006, dont le contenu était le même que celui de l'article 2021, la nullité du cautionnement n'était pas encourue dès lors que les différences ainsi observées n'affectaient pas la portée des mentions manuscrites prescrites par la loi ; ») ne prononçait pas l’annulation du cautionnement malgré les différences (un point à la place d’une virgule) entre la mention manuscrite par la caution et celle consacrée dès lors que les modifications n’en affectaient pas le sens et la portée (Cass. Com. 27 janvier 2015, pourvoi n°13-24.778 : «Mais attendu qu'après avoir constaté qu'à la formule de l'article L. 341-2 du code de la consommation, la banque avait fait ajouter, après la mention « au prêteur », les mots suivants : « ou à toute personne qui lui sera substituée en cas de fusion, absorption, scission ou apports d'actifs », l'arrêt retient que cet ajout, portant exclusivement sur la personne du prêteur, ne dénature pas l'acte de caution et n'en rend pas plus difficile la compréhension ; qu'ayant ainsi fait ressortir que l'ajout n'avait pas altéré la compréhension par les cautions du sens et de la portée de leurs engagements, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ; ». Également la Cass. Com. 9 mai 2018, pourvoi n°16-26.926 : exemple d’une erreur matérielle par adjonction d’un mot superflu).
Ainsi, les modifications qui rendaient désordonnée et confuse la mention en imposant son interprétation permettaient au juge de prononcer la nullité du contrat du fait de l’altération de la compréhension du sens et de la portée des formules consacrées. Ce positionnement est consolidé par plusieurs décisions prononcées (Cass. Com. 7 février 2018 [pourvoi n°16-20.586], Cass. Com. 10 janvier 2018 [pourvoi n°15-26.324] ; a contrario : Cass. Com. 28 mars 2018 [pourvoi n°16-26.561] ; Cass. Com. 9 mai 2018 [pourvoi n°16-26.926]), notamment en 2018, par la Cour de cassation. La jurisprudence sanctionne par la nullité le cautionnement dont la mention manuscrite par la caution, personne physique, n’est pas identique à la formule consacrée mais uniquement si l’altération de la formule consacrée en affecte lourdement le sens et la portée. Dans l’arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation, en date du 10 janvier 2018 (pourvoi n°15-26.324 : «Mais attendu, d'une part, qu'ayant retenu, par motifs propres, que l'indication du débiteur principal avait été omise dans la mention manuscrite, de même que les termes « dans la limite de », et relevé, par motifs adoptés, l'omission de plusieurs conjonctions de coordination articulant le texte et lui donnant sa signification, ce qui allait au-delà du simple oubli matériel, la cour d'appel en a exactement déduit que l'accumulation de ces irrégularités constituait une méconnaissance significative des obligations légales qui affectait le sens et la portée des mentions manuscrites, justifiant l'annulation de l'acte de cautionnement ; »), la mention manuscrite par la caution comportait de nombreuses omissions qui en altéraient le sens (Cass. Com. 7 février 2018 [pourvoi n°16-20.586] :« Qu’en statuant ainsi, alors que l'erreur relevée, en ce qu'elle rendait la mention manuscrite légale inintelligible, en affectait le sens et la portée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;») et laissaient appréhender ses irrégularités comme une grave altération du consentement de ladite caution. La formule légalement consacrée étant posée comme la matérialisation d’une adhésion réelle, sérieuse et pleinement consciente. L’altération (par l’omission de conjonctions de coordination ou de termes) du sens implique l’altération de l’intégrité du consentement justifiant ainsi l’annulation du contrat. Dès lors, malgré l’adoucissement de la sévérité appliquée à la vérification de la liberté prise dans le recopiage des formules consacrées par les articles L331-1 et L331-2 du Code de la consommation, il est indispensable que le créancier s’impose l’obligation (de résultat) de veiller que la substance du sens et de la portée de ladite formule ne soit pas altérée au risque pour lui de perdre la garantie adjointe au remboursement de sa créance en cas de défaillance du débiteur principal.
Du débat sur l’exactitude stricte des formules consacrées, l’on arrive enfin à l’essentiel, c’est-à-dire que ce qui est important ce n’est pas l’altération de l’instrumentum (les mots et les ponctuations des formules) mais le negotium (la substance de l’engagement). Les formules consacrées par les articles L331-1 et L331-2 du Code de la consommation, matérialisent le souci du Législateur de s’assurer que la personne physique, qui se porte caution (simple ou solidaire) envers un créancier professionnel, a bien saisi l’ampleur de la gravité de son engagement. Les formules cristallisent la compréhension de l’engagement de cautionnement, mais également ce qui est l’essentiel du contenu de l’engagement. C’est à ce titre que la Cour de cassation, en date du 14 mars 2018 (pourvoi n° 14-17.931), n’annule pas le cautionnement mais le limite aux accessoires de la dette car lors de l’apposition de la mention par la caution, cette dernière avait omis d’inscrire le mot « principal ». Les mentions consacrées par les articles précités sont incontestablement liées à l’obligation d’information de la caution par le créancier professionnel. Elles constituent la preuve de la compréhension de la substance du cautionnement au point ou si l’altération des mentions en impacte le sens alors la nullité encourue. Dès lors, le cœur du débat sur l’intégrité (et non l’exactitude, du coup) des formules consacrées est en fait porté par la question de savoir si le créancier professionnel a exécuté son obligation d’information de résultat quant à la vérification que la mention effectivement manuscrite, par la personne physique qui se porte caution, n’est pas affecté d’une ou plusieurs altérations nuisibles à son l’intelligibilité. La sanction du défaut d’exécution de cette obligation de correction de résultat sera la nullité dès lors que le juge constatera que les erreurs de plume ou les libertés de plume altèrent la compréhension par les cautions du sens et de la portée de leurs engagements.