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  • Laurent T. MONTET
  • Chargé de Travaux Dirigés à l'Université de Guyane
Docteur en droit privé.
  • Chargé de Travaux Dirigés à l'Université de Guyane Docteur en droit privé.

Thèse : "Le dualisme des ordres juridictionnels"

Thèse soutenue le 27 novembre 2014 en salle du conseil  de la faculté de droit de l'Université de Toulon

Composition du jury:

Le président

Yves STRICKLER (Professeur d'université à Nice),

Les rapporteurs: 

Mme Dominique D'Ambra (Professeur d'université à Strasbourg) et M. Frédéric Rouvière (Professeur d'université à Aix-en-Provence),

Membre du jury:

Mme Maryse Baudrez (Professeur d'université à Toulon),

Directrice de thèse :

Mme Mélina Douchy (Professeur d 'Université à Toulon).

laurent.montet@yahoo.fr


18 février 2011 5 18 /02 /février /2011 23:23

 

La notion de « contractualisation du procès·» ou encore de  « contractualisation de la justice1 » à fait l’objet de nombreux articles visant à en expliquer le contenu. De ces écrits il est aisé de déduire que la contractualisation du procès n’implique pas nécessairement l’usage de Modes Alternatifs de Règlement de Litiges (MARL) en revanche les modes de règlement amiable sont indissociables d’une logique contractuelle2 et ont pour finalité escomptée d’avoir l’effet judiciaire d’un jugement. La « contractualisation de la justice » est un terme générique qui décrit en quelques mots les clauses3 touchant à l’action en justice, celles relatives à l’instance, les protocoles d’accord ou encore les transactions et enfin les MARL. Pour certains c’est aussi une issue aux problèmes d’encombrement des juridictions car la contractualisation du procès  est la rencontre d’une commune volonté des parties en vue de trouver une solution à leur différend.

 

Dans le rapport4 dirigé par Jean-Claude Magendie et remis en 2004, la solution proposée sous l’intitulé « La contractualisation du procès civil5 » est construite sur deux axes les clauses attributives de compétence territoriale et l’amiable composition. Ces axes de réflexion n’ont rien à avoir avec des MARL. Le premier est une convention dans laquelle les parties s’accordent sur la juridiction qui sera territorialement compétente lorsque naîtra un litige (art. 48 NCPC). Le second axe est une faculté octroyée aux parties, celles-ci peuvent demander au juge de juger en équité (art. 12 in fine du NCPC). Le rapport6 Magendie proposait l’élargissement de la validité des clauses attributives de compétence7 et la réécriture de l’article 12, alinéa 4 du NCPC8. Malgré leurs pertinences, les réformes récentes9 de la procédure civile ne tiennent pas compte de ces propositions. Cependant le Législateur et le Juge posent les jalons de l’épanouissement d’une justice de proximité. Loin de la juridiction de proximité créée par la loi du 9 septembre 2002 (modifiée par une loi du 21 janvier 2005, complétée par deux lois10 de mars 2010) pour « débarrasser » les juges des « petits litiges » ; L’idée de contractualisation du procès est inhérente au concept d’une justice proche du justiciable car le litige reste la propriété des parties et ça résolution naît de « l’imaginaire » de celles-ci.

 

Le Législateur a produit des textes relatifs à l’arbitrage, la conciliation, la transaction, la procédure d’homologation11 et la médiation judiciaire12. Le juge dans sa lecture du droit a précisé les contours et la validité de certaines clauses13. Les justiciables français ont à leurs dispositions plusieurs outils afin de résoudre hors toutes juridictions étatiques les litiges nés ou à naître. La médiation semble attirée vers elle beaucoup de praticiens au point où ce Mode Alternatif de Règlement de Litiges se professionnalise14. Mais dans un paysage où les modes de règlements amiables sont si nombreux, qu’est-ce qui fait la différence ?

 

Malgré une efficacité démontrée, il est compréhensible que le justiciable « moyen » préfère la médiation à l’arbitrage car ce dernier est très coûteux, parfois plus que la voie judiciaire classique. De plus l’arbitrage n’est pas approprié à la résolution de « petits litiges », son domaine de prédilection est le commerce et ses « usagés » sont généralement des professionnels ou des sociétés comerciales. En outre il ne serait pas incorrect de considérer l’arbitrage comme une voie « parallèle » plutôt qu’une voie « alternative ». Car l’arbitrage est une véritable instance15, la loi et la pratique en ont fait une institution au détriment de son caractère contractuel. Les sentences16 arbitrales n’ont pas qu’une allure de jugement. Ainsi vu de l’extérieur et il en est probablement de même vu de l’intérieur, l’arbitrage ressemble17 beaucoup au monolithe des institutions judiciaires au point où c’est la voie classique qui dans cette situation devient une alternative.

Lorsqu’un justiciable envisage18 une alternative aux voies classiques, il s’y engage en spéculant sur l’accessibilité (coût), la rapidité et l’efficacité (satisfaction). Alors si le choix du mode alternatif est motivé uniquement par les questions de célérité et du rapport coût de la procédure ; pourquoi ne pas préféré la conciliation à la médiation ? Le conciliateur de justice est un bénévole contrairement à beaucoup de médiateurs.

 

La médiation est un contrat qui organise un processus de règlement amiable d’un litige à naître ou né. Les règles qui régissent cette situation sont celles de l’expression de l’autonomie des volontés des parties dans la limite du respect de l’ordre public. Mais concrètement quelle est la portée juridique de la médiation ? Quelle est l’efficacité juridique ou judiciaire de l’accord qui en découle ?

La médiation doit être observée d’un point de vu contractuel à savoir au regard des principes directeurs des contrats, de ces modes de formation, d’existence et de validité pour en déduire si ce MARL peut tirer toute son efficacité de la seule logique contractuelle. D’un point de vue procédural et processuel, ce contrat offre t-il les mêmes garanties qu’un procès et le protocole d’accord, qu’il soit homologué19 ou non, offrira t-il des garanties similaires à un jugement comme c’est le cas pour une sentence arbitrale ? il semble que c’est le cas ; en outre il est moins sujet aux difficultés d’exécution que rencontre beaucoup de décisions de justice.

 

 


 

 

1. Loïc Cadiet, « Découvrir la justice », Dalloz, 1997, p. 65

2. Michèle Guillaume-Hofnung, « La médiation », que sais-je ? n°2930. Martine Bourry d’Antain, Gérard Pluyette, Stephen Bensimon, « Art et techniques de la médiation », Pratique professionnelle, Litec

3. Loïc Cadiet, « Les clauses contractuelles relatives à l’action en justice », sous la direction de J. MESTRE, les principales clauses des contrats conclus entre professionnels, PUAM, 1990, p. 193-223.

4. Rapport Magendie, « Célérité et qualité de la justice » 2004, http://www.justice.gouv.fr

6. Le rapport Guinchard est, sur ce point, plus (mieux) inspiré.

7. Rapport Magendie, « Célérité et qualité de la justice » 2004, p. 86

8. Rapport Magendie, « Célérité et qualité de la justice » 2004, p. 87

9. Décret du 20 août 2004 et Décret du 28 décembre 2005.

10. Loi n°2010-242 du 10 mars 2010 tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale ; Loi n°2010-201 du 2 mars 2010 renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d'une mission de service public.

 

11. Décret du 28 décembre 1998 crée l’article 1441-4 du NCPC

12. Décret du 22 juillet 1996 crée un titre VI bis « La médiation »

13. Décision de la Cour de cassation du 14 février et du 17 juin 2003 concernant les clauses de conciliation. Décision de la Cour de cassation du 8 avril 2009 (pourvoi n°08-10.866) relatif à une clause de médiation.

14. Jean-Pierre Bonafé-Schmitt, « Les médiateurs : vers une professionnalisation ? » dans, les modes alternatifs de règlements des litiges : les voies nouvelles d’une autre justice, p. 205

15. Voir Titre II du livre quatrième du NCPC, art ; 1460 à 1468 du NCPC

16. Art. 1469 à 1491 du NCPC

17. L’arbitrage assure une confidentialité que les juridictions classiques ne peuvent pas toujours garantir. De grands litiges commerciaux sont réglés par la voie de l’arbitrage (interne ou international) ou sont délocalisés (clause attributive de compétence).

18. Il faut insérer cette démarche dans une logique consumériste, les MARL sont plus sensible à cette logique que les voies classiques.

19. Jean-Baptiste Racine, « Les incertitudes de la transaction dite homologuée », p. 151 dans Les modes alternatifs de règlement des litiges : les voies nouvelles d’une autre justice, la documentation française

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