Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Profil

  • Laurent T. MONTET
  • Chargé de Travaux Dirigés à l'Université de Guyane
Docteur en droit privé.
  • Chargé de Travaux Dirigés à l'Université de Guyane Docteur en droit privé.

Thèse : "Le dualisme des ordres juridictionnels"

Thèse soutenue le 27 novembre 2014 en salle du conseil  de la faculté de droit de l'Université de Toulon

Composition du jury:

Le président

Yves STRICKLER (Professeur d'université à Nice),

Les rapporteurs: 

Mme Dominique D'Ambra (Professeur d'université à Strasbourg) et M. Frédéric Rouvière (Professeur d'université à Aix-en-Provence),

Membre du jury:

Mme Maryse Baudrez (Professeur d'université à Toulon),

Directrice de thèse :

Mme Mélina Douchy (Professeur d 'Université à Toulon).

laurent.montet@yahoo.fr


5 novembre 2019 2 05 /11 /novembre /2019 19:57

 Arrêt de la Cour de cassation chambre commerciale en date du 1er mars 2016

(pourvoi n° n° 14-14401)

L’ordonnance n°2006-346 du 23 mars 2006 a réalisé un travail très important de refonte du droit des sûretés. En effet, outre la consécration législative de la garantie autonome et de la lettre d’intention, sûretés créées par la pratique, ce texte clarifie l’ordonnancement juridique des sûretés réelles intéressant les biens meubles corporels et incorporel. Il est mis un point final à l’option terminologique qui subsistait entre le nantissement et le gage pour désigner tantôt l’affectation d’une sûreté à un bien meuble corporel tantôt l’affectation d’une sûreté à un bien meuble incorporel. 

 

Désormais, le gage est le contrat par lequel, une tierce personne ou un débiteur (dénommé constituant), accorde à une autre personne la faculté d’être désintéresser par préférence à ses autres créanciers sur un bien meuble (corporel, présent ou futur) ou sur un ensemble de biens meubles corporels, présents ou futurs. Cette définition est celle posée par l’article 2333 qui est inséré au code civil par l’ordonnance n°2006-346 du 23 mars 2006. Cependant, concomitamment à la création d’un droit commun du gage au sein du Code civil, l’ordonnance n°2006-346 du 23 mars 2006 introduit au sein du Code de commerce un gage spécial dénommé « gage des stocks » et décrit aux articles L527-1 à L527-9. Dès lors par cette démarche, il est manifeste que le Législateur a voulu créer deux types de régime juridique pour le gage. L’un est réalisable avec ou sans dépossession (notamment articles 2341 et 2342 du Code civil) et il y ait autorisé le pacte commissoire (art.2348 du code civil). L’autre est réalisable exclusivement sans dépossession (ancien article L527-1 du Code de commerce) et il n’y ait pas autorisé de pacte commissoire (ancien article L527-2 du Code de commerce). En outre, le gage des stocks est réservé aux biens meubles listés à l’article L523-3 du Code de commerce.

 

Lorsque coexiste deux régimes juridiques pour un même contrat, il se pose la question de l’intérêt de cette distinction. En effet, quelle est la pertinence de l’institution d’un gage spécialisé plus restrictif que le gage de droit commun, car constitué nécessairement sans dépossession et interdit de pacte commissoire. Cette différence entre le gage de droit commun et le gage des stocks, à fait que des professionnels du crédit optaient pour un gage constitué conformément au droit commun. C’est à ce niveau que ce situe la décision de la chambre commerciale en date du 1er mars 2016.

 

La coexistence de deux régimes juridiques de gage a fait naître un contentieux quant à l’existence d’un libre choix entre l’un ou l’autre régime. Il y a sur ce point confrontation, ou plutôt résistance, des juges du fond vis-à-vis de la doctrine de la Cour de Cassation (décision de l’assemblée plénière de la Cour de cassation en date du 7 décembre 2015, pourvoi n°14-18.435 ; décision de la chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 19 février 2013, pourvoi n°11-21.763).

Pour cette dernière, il n’existe pas de libre choix entre le gage de l’article 2333 du Code civil et le gage de l’article L527-1 du code de commerce, dès lors que l’un des contractant est un établissement de crédit. Cette position est assez incompréhensible d’autant que rien dans l’article L527-1 du Code de commerce ne laisse sous entendre l’impossibilité d’option, bien au contraire. Dans le texte précité, il est sans ambiguïté mise en relief l’existence d’une faculté de choisir. Il est prescrit que le crédit accordé par un professionnel du crédit à une personne morale ou à une personne physique à l’occasion de son activité professionnelle peut être garanti par un gage sans dépossession des stocks détenus par cette personne. Dès lors, est contraire aux termes de la loi la position consistant à interdire l’utilisation du gage de droit commun lorsqu’un professionnel du crédit est bénéficiaire.  Le législateur, par une ordonnance n°2016-56 en date du 29 janvier 2016 relative au gage des stocks et par une loi n°2016-1547 en date du 18 novembre 2016 portant modernisation de la justice du XXIème siècle et ratification de l’ordonnance précité (à l’article 107), reformate le régime juridique du gage des stocks notamment l’article L527-1 du code de commerce.

Il est expressément posé le libre choix de la manière suivante : « Les parties demeurent libres de recourir au gage des stocks prévu au présent chapitre ou au gage de meubles corporels prévu aux articles 2333 et suivants du code civil. ».

 

En outre, il est procédé à un rapprochement franc avec le gage de droit commun. La Cour de cassation, sur cette question, n’est pas suivie par le Législateur. Cette dernière ne peut que s’incliner. La décision de la chambre commerciale en date du 1er mars 2016 marque la consécration du libre choix entre l’un des deux types de gage. Cependant, par cette refonte, il semble qu’est totalement été dilué voire effacée les quelques différences qui était perceptible avant la réforme du gage des stocks.

Partager cet article
Repost0

commentaires