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Profil

  • Laurent T. MONTET
  • Chargé de Travaux Dirigés à l'Université de Guyane
Docteur en droit privé.
  • Chargé de Travaux Dirigés à l'Université de Guyane Docteur en droit privé.

Thèse : "Le dualisme des ordres juridictionnels"

Thèse soutenue le 27 novembre 2014 en salle du conseil  de la faculté de droit de l'Université de Toulon

Composition du jury:

Le président

Yves STRICKLER (Professeur d'université à Nice),

Les rapporteurs: 

Mme Dominique D'Ambra (Professeur d'université à Strasbourg) et M. Frédéric Rouvière (Professeur d'université à Aix-en-Provence),

Membre du jury:

Mme Maryse Baudrez (Professeur d'université à Toulon),

Directrice de thèse :

Mme Mélina Douchy (Professeur d 'Université à Toulon).

laurent.montet@yahoo.fr


18 février 2011 5 18 /02 /février /2011 22:26

Le sort de l’intervention volontaire principale est indépendant de celui de la demande initiale. (3ème chambre civ. 13 juillet 2010 [pourvoi n°09-15.474])

 

La décision d’une Cour d’appel qui excipe le défaut de qualité pour agir du demandeur initial pour déclarer irrecevable la reprise d’une instance par un intervenant volontaire, doit subir la cassation dès lors que l’intervention élève une prétention au soutien d’un droit propre à son auteur.

 

La question de l’autonomie du sort de l’intervention volontaire principale vis-à-vis des tares de la demande initiale est ni nouvelle ni véritablement problématique (Civ. 1ère, 20 mai 1969, Bull. civ. III, n°195 ; Civ. 3ème, 14 juin 1972, Bull. civ. III, n°400 ; Civ. 3ème, 4 janvier 1973, Bull. civ. III, n°13 ; Com. 21 octobre 1975, D. 1976, Jur. 67, note Derrida ; Com. 8 avril 1976, Bull. civ. IV, n°107 ; Civ. 1ère, 7 novembre 1978, Bull. civ. I, n°332 ; Civ. 2ème, 11 mars 1981, Bull. civ. II, n°52 ; Civ. 3ème, 10 mars 1983, Bull. civ. III, n°49 ; Civ. 2ème, 22 février 1984, Bull. civ. II, n°35 ; Civ. 3ème, 1er avril 1987, JCP 1987, IV, 199 ; Civ. 3ème, 21 février 1990, Bull. civ. III, n°61 ; Com. 14 mai 1991, Bull. civ. IV, n°160 ; Com. 10 décembre 2002, Rev. Sociétés 2003, p.151, obs. Yves Guyon ; Civ. 2ème, 13 juillet 2006, D. 2007, Pan. 1380, obs. Pierre Julien), car il y a une solution ancienne pérenne.

 

En l’espèce, une Société Civile Immobilière (SCI) consent, en date du 6 juillet 1987, un bail à construction à une autre société (société d’exploitation Teisseyre). En outre, la SCI consent également sur le même terrain un bail commercial (24 avril 1992) au profit des consorts B. ces derniers cèdent (7 avril 1999) leur bail à C.

La SCI et la société Teisseyre notifient (29 octobre 2003) à C un congé avec proposition de renouvellement mais à un prix réévalué. Le désaccord persistant sur la fixation du prix du loyer, la société Teisseyre entreprend d’assigner C devant le juge des loyers commerciaux. C’est devant cette juridiction que C excipe le défaut de qualité pour agir de la société Teisseyre. C’est ainsi que le juge initialement saisi se déclare incompétent et renvoie les parties devant le Tribunal de Grande Instance. Dans l’entre-temps procédural, la société Soval acquiert (29 avril 2006) le bail à construction, la propriété du terrain et intervient volontairement à l’instance entamée par la société Teisseyre.

Arguant que l’intervention de la société Soval est conditionnée par l’existence de la demande initiale faite par la société Teisseyre et qu’elle n’a pas force régularisatrice de l’instance, la Cour d’appel de Montpellier (25 mars 2009) déclare irrecevable l’intervention.

 

S’il avait s’agit pour le juge d’appel de statuer uniquement au regard de la situation de l’auteur de la demande initiale ; l’irrecevabilité prononcée trouverait une base légale. En effet, en tant que preneur au sein d’un bail à construction, la société Teisseyre n’a pas qualité pour agir et donc elle n’était pas recevable à assigner C par-devant le juge des loyers commerciaux. La société Teisseyre n’est pas le bailleur. Aussi, dans cette configuration l’hypothèse la mieux adaptée à sa situation eut été l’intervention volontaire accessoire (art. 328 et 330 du Code de procédure civile) à la demande initiale du bailleur (la SCI), car en tant que preneur au sein d’un bail à construction il disposait d’un intérêt (art. L.251-1, L251-2 et L251-3 al. 1er) au soutien de la demande initiale (Civ. 3ème, 20 janvier 1976, Bull. civ. III, n°22 ; Civ. 2ème, 17 novembre 2005, Bull. civ. II, n°294). Cependant, la SCI n’a pas pris d’initiative procédurale. Aussi, en tant que preneur, la société Teisseyre n’avait pas qualité pour agir et le cessionnaire du droit réel immobilier ne pouvait, par cette seule qualité, poursuivre l’action. La Teisseyre ne pouvait transmettre un droit qu’elle n’avait pas. Cela étant, est plus perceptible l’erreur des juges d’appel, car la recevabilité de l’intervention volontaire principale doit être déterminée en fonction de la situation de son auteur, conformément à l’article 329 du Code de procédure civile.

 

L’intervention volontaire principale est recevable lorsque sont auteur a le droit d’agir relativement à la prétention qu’il élève à son profit. Cela impose la tautologie suivante, l’intervention volontaire principale n’étant pas l’accessoire d’une demande initiale ; elle ne doit pas être jaugée au regard de cette dernière. C’est ainsi que peut se résumer l’autonomie de l’intervention volontaire principale et sa faculté de survivance à la demande initiale (Civ. 2ème, 22 septembre 2005, Bull. civ. II, n°232).

La société Soval a fait l’acquisition du terrain de la SCI. Dès lors, Soval est le bailleur de C et elle est donc recevable à élever ses prétentions à fin de réévaluation du loyer. De ce point de vue, n’est pas pertinent le moyen excipant le défaut de qualité de l’auteur de la demande initiale afin d’obtenir l’irrecevabilité de l’intervention volontaire principale.

 

Nonobstant le fait que cette demande incidente (qu’est l’intervention volontaire principale, art. 63 du Code de procédure civile) semble être « dure à cuire » grâce à son autonomie, cela ne la rend pas pour autant indestructible. En effet, si elle sait survivre à la demande initiale, à l’instar de celle-ci, l’intervention volontaire principale est vulnérable aux fins de non-recevoir, notamment au délai de forclusion (Com. 21 octobre 1975, D. 1976, Jur. 67, note Derrida ; Com. 25 mai 1976, Bull. civ. IV, n°179). En outre, l’intervention doit avoir un lien suffisant avec la demande initiale (Art. 325 du Code de procédure civile ; Ch. Mixte, 9 novembre 2007, Bull. n°10).

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