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Profil

  • Laurent T. MONTET
  • Chargé de Travaux Dirigés à l'Université de Guyane
Docteur en droit privé.
  • Chargé de Travaux Dirigés à l'Université de Guyane Docteur en droit privé.

Thèse : "Le dualisme des ordres juridictionnels"

Thèse soutenue le 27 novembre 2014 en salle du conseil  de la faculté de droit de l'Université de Toulon

Composition du jury:

Le président

Yves STRICKLER (Professeur d'université à Nice),

Les rapporteurs: 

Mme Dominique D'Ambra (Professeur d'université à Strasbourg) et M. Frédéric Rouvière (Professeur d'université à Aix-en-Provence),

Membre du jury:

Mme Maryse Baudrez (Professeur d'université à Toulon),

Directrice de thèse :

Mme Mélina Douchy (Professeur d 'Université à Toulon).

laurent.montet@yahoo.fr


18 février 2011 5 18 /02 /février /2011 23:17

 

La sujétion est un processus consubstantiel au caractère impératif de la règle de droit. La mise en œuvre de cette efficacité de la justiciabilité nécessite l’intervention d’un organe spécialisé. Historiquement, la justiciabilité « ordinaire », celle des actes de l’administration et celle de la Loi étaient le fait d’une même autorité. En effet, au sein de l’empire romain, durant le Moyen-Âge ou encore sous l’Ancien Régime, l’entité qui administrait était également celle qui avait l’office de juger si bien que le contenu de ces fonctions était perçu comme indissociable.

 

Les Cours souveraines de l’Ancien Régime étaient des autorités administrative et judiciaire car le roi, seul détenteur du pouvoir (exécutif, législatif et judiciaire), avait conféré à ces entités une parcelle de sa souveraineté. Elles avaient donc une autorité tant au sein de la police (ou administration) générale (dans le cadre de leurs compétences) qu’au sein de la résolution des différends nés dans leurs circonscriptions.

L’utilisation déviante de cette autorité conférée a nécessité un correctif. En effet, si les parlements de l’Ancien Régime, malgré leur indépendance de fait, avaient continué à servir docilement le monarque ; l’édiction d’un principe de séparation des autorités administrative et judiciaire serait inopportun. La prohibition portée par le principe de séparation des autorités est la solution réflexe qui apporte la résolution supposée la plus immédiate contre un problème ponctuel, c'est-à-dire les complications posées à l’action de l’administration par les Cours souveraines via les moyens tant judiciaire qu’administratif dont elles disposaient. Aussi, au regard du dysfonctionnement que posait l’abus d’autorité des parlements. Il tenait d’une bonne administration du royaume que de procéder à une réorganisation structurelle et fonctionnelle du système administratif/judiciaire.

Ainsi, il faut appréhender la signification du principe de séparation des autorités administrative et judiciaire en tenant compte de l’efficacité escomptée par l’auteur de ce dernier. En effet, l’objectif de l’Administration centrale (Monarchie, Directoire, Consulat, l’Empire, Restauration) était de préserver son pouvoir et même de l’accroître (absolutisme ou autoritarisme). Ainsi, il était opportun pour le pouvoir central, à défaut de docilité spontanée du corps principalement dépositaire des autorités administrative et judiciaire, de s’octroyer un mécanisme de soumission au droit qui s’ajuste bien aux nécessités de la Raison d’état et qui soit également concordant avec le projet sociopolitique de celui qui gouverne seul ou en conseil.

 

Le principe de séparation des autorités ne partage pas les mêmes valeurs que la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789. Pourtant, le principe de séparation des autorités administrative et judiciaire a cohabité avec l’un des principes phares de la déclaration précitée, c'est-à-dire le principe de la séparation des pouvoirs. Il y a une antinomie indiscutable1 entre ces principes, et leur cohabitation marque un hiatus tant organisationnel que juridique. En effet, il y a une cacophonie2 dans le fait de prôner la plénitude3 et l’indépendance de chaque pouvoir composant l’entité étatique corrélativement à la réitération d’un principe d’interdiction de l’exercice, par l’un des pouvoirs (le judiciaire), de sa plénitude.

 

Les révolutionnaires ont eu du mal à réaliser les valeurs contenues au sein de leur « Déclaration ». Leur action est surtout marquée par une forte réaction à la réalité de l’Ancien Régime surtout aux conflits entre le roi et les parlements. Ainsi, l’érosion de la cacophonie est-elle véritablement entamée4 à partir de la loi du 24 mai 1872. Entre temps, c’est forgée et consolidée la mythique « conception française de la séparation des pouvoirs5 ».

 

 


1. Dany COHEN, « La Cour de cassation et la séparation des autorités administrative et judiciaire » p.1-11 ; Economica (1987) – Collection, droit civil.

2. Michel TROPER, « La séparation des pouvoirs et l’histoire constitutionnelle française » p.43-57 ; LGDJ.

3. Jean FOYER, Gilles LEBRETON et Catherine PUIGELIER, « L’autorité » p.231-255 ; PUF (2008).

4. Dany COHEN, « La Cour de cassation et la séparation des autorités administrative et judiciaire » p.143-145 ; Economica (1987) – Collection, droit civil.

5. Décision du Conseil constitutionnel en date du 23 janvier 1987 (n°86-224 DC).

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