Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Profil

  • Laurent T. MONTET
  • Chargé de Travaux Dirigés à l'Université de Guyane
Docteur en droit privé.
  • Chargé de Travaux Dirigés à l'Université de Guyane Docteur en droit privé.

Thèse : "Le dualisme des ordres juridictionnels"

Thèse soutenue le 27 novembre 2014 en salle du conseil  de la faculté de droit de l'Université de Toulon

Composition du jury:

Le président

Yves STRICKLER (Professeur d'université à Nice),

Les rapporteurs: 

Mme Dominique D'Ambra (Professeur d'université à Strasbourg) et M. Frédéric Rouvière (Professeur d'université à Aix-en-Provence),

Membre du jury:

Mme Maryse Baudrez (Professeur d'université à Toulon),

Directrice de thèse :

Mme Mélina Douchy (Professeur d 'Université à Toulon).

laurent.montet@yahoo.fr


26 mars 2021 5 26 /03 /mars /2021 21:18

Il est question de savoir si un juge peut refuser de statuer sur une demande dont il admet le bien-fondé en son principe, au motif de l'insuffisance des preuves fournies par une partie ?

Le droit d’agir (article 30 du Code de procédure civile) est la faculté pour une personne (physique ou morale) de soumettre à un Juge un différend qui l’oppose à une autre personne afin que la juridiction tranche le litige. Pour ce faire, la juridiction saisie devra évaluer le bien-fondé de la demande notamment par l’analyse des éléments qui matérialisent l’existence de l’obligation dont il est réclamé l’exécution (art. 1353 du Code civil). Ainsi, se pose la question de savoir si un juge peut refuser de trancher un litige indemnitaire après avoir admis le bien-fondé de la demande ?

 

C’est à ce titre, que la décision du 2 juillet 2020  de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation (pourvoi n°19-16.100)  constitue une illustration intéressante de l’ampleur des obligations d’un juge lorsqu’est mis en œuvre le droit d’agir.

 

L’objet de la fonction juridictionnelle consiste, de manière substantielle, à dire le droit et trancher les litiges (D. AMBRA, « L’objet de la fonction juridictionnelle : dire le droit et trancher les litiges » ; LGDJ 1994). Autrement-dit, à l’appui de la Loi applicable au litige (art. 12 al.1 du Code de procédure civile), le juge doit poser une solution qui s’impose à l’espèce. Ainsi, pour mettre en œuvre cette mission régalienne, la juridiction juridictionnelle saisie doit parfois faire œuvre d’interprétation afin d’extirper au Texte le substrat normatif porteur de solution. Ce travail peut se révéler laborieux selon l’état de la Loi, mais il ne peut exciper de la carence de la Loi (art. 4 du Code civil) un moyen pour ne pas trancher le litige qui lui est soumis.

 

Le droit d’agir est la faculté d’exiger que le litige soit tranché. À ce titre, débiteur de l’obligation de dire le droit et de trancher le litige, le juge est lié et doit se prononcer uniquement sur les demandes formulées (art. 5 du Code de procédure) et sur toutes les demandes formulées.

 

Ainsi, en l’espèce, la juridiction qui refuse de statuer sur une demande indemnitaire alors qu’elle admet l’existence du préjudice et caractérise le lien de causalité avec l’acte dommageable méconnait l’ampleur de sa compétence. En effet, le jugement en cause ne quantifie pas l’indemnité au prétexte que le demandeur n’apporte pas les éléments propres à en permettre l’évaluation. Il est vrai qu’il est peu judicieux pour la personne qui réclame une indemnité de ne pas être en situation d’apporter les éléments d’évaluation du préjudice. Cependant, dans la mesure où le préjudice est admis, que le lien de causalité avec l’événement source du dommage est caractérisé, il est de la charge du juge de mettre en œuvre les mesures d’instruction qui lui permettront de trancher le litige (art. 10 du Code de procédure civile).

Par conséquent, la position de la 2ème chambre de la Cour de cassation (pourvoi n°19-16.100)  n’est pas une surprise. Elle est dans la continuité de la défense des justifiables contre les situations de déni de justice du fait de la méconnaissance par le juge de ses pouvoirs en matière de sollicitation de mesures d’instruction.

Partager cet article
Repost0

commentaires